Le 13 mars : Perte de masse osseuse
Ce cycle de traitement s'est bien déroulé, je n'ai pas eu de surprise particulière. C'est le 3ème traitement de ce type et les données à ma disposition se montrent de plus en plus fiables, ce qui me donne un bon niveau de confiance pour mes prévisions. L'EPO apporte une contribution majeure (et aussi aux J.O. d'hiver : j'ai donc des concurrents) et m'évite cette fois-ci une transfusion de globules rouges. Pourtant l'Aracytine et l'Endoxan restent très agressifs vis à vis de mes globules rouges. En revanche les corticoïdes semblent avoir un effet dévastateur sur ma densité osseuse. Une mauvaise chute lors d'une promenade avec les enfants à l'automne dernier a mis en évidence la décalcification de mon squelette. Un examen d'ostéodensitométrie confirme cette perte de masse osseuse. Je me sens vraiment très très vieux, vous comprendrez pourquoi. Vous trouverez aussi un résumé de l'examen avec quelques clichés BMD (Bone Mineral Density). Il semble qu'il y ait des solutions, j'ai obtenu un rendez-vous à l'hôpital Cochin grâce à Arnaud. Rendez-vous le 8 avril.
Il faut maintenant anticiper le prochain traitement et pour cela j'ai joué à l'apprenti sorcier en calculant mon dosage de l'EPO jusqu'au 13 mars. Mais attention il y a des spécifications à respecter pour éviter des complications et l'affolement de l'hôpital de jour. Après coup ces calculs se sont avérés corrects. Dans le même registre, je me suis construit des outils pour me faciliter l'entretien avec le médecin pour chaque nouvelles séances de traitement (voir mon coin à pharmacie) : il y a un tableau de bord, des ordonnances pré-remplies car il y en a tellement qu'il en manque toujours une ; et un formulaire vierge d'arrêt de travail type "maladie professionnelle" (quasi-introuvable).
Pour terminer, j'ai commencé une nouvelle rubrique "les mots qui font du bien". Un an après, j'ai le recul suffisant pour faire le point. Basée autour de vos e-mails les plus marquants, cette section est destinée à montrer étape par étape de ma progression les réactions de mon environnement. Le début de ma maladie suscite la consternation et le réconfort, puis ils laissent place petit à petit aux conseils, à l'humour... Car l'environnement s'adapte en fonction de mes progrès. Et le moral se nourrit, mieux, se gave de cette progression. Ce moral qu'on connaît assez peu habituellement, devient une force surprenante lorsqu'on est malade. A partir de quand je me suis mis à croire à la guérison ? quel a été le déclic ? C'est ce que je vais essayer de retracer. Encore en construction, une section "les mots qui font du bien" est matérialisée par un lien à la fin des premières chroniques du journal. Patience...
Détail de la séance
Comme convenu j'ai eu mon traitement de chimiothérapie le vendredi 1er février. Je suis arrivé en excellente forme. Après l'entretien habituel avec le médecin pour connaître si mon séjour à la maison s'était bien déroulé puis un examen clinique effectué (palpation de la rate, du foie, des ganglions au cou, aux aisselles, à l'aine, percussion du thorax...), la chimiothérapie peut commencer. Je suis donc reparti avec ma pompe en bandoulière. Cette fois-ci j'ai ressenti l'effet dès les premières minutes de l'injection : engourdissement et fourmillement. Du coup, le temps d'aller chercher mes médicaments à la pharmacie centrale (vous ai-je déjà dit que l'EPO n'était disponible qu'en hôpital ?) et retourner au taxi m'a semblé terriblement long et pénible.
De retour à la maison, je me suis reposé l'après-midi. Samedi, j'ai dormi toute la journée. Dimanche j'ai passé la journée au lit. Lundi j'étais de nouveau sur pieds. C'est bien la première fois que je me rétablisse aussi rapidement après une chimiothérapie. Du 5 au dimanche 10 février nous avons fait quelques sorties en forêt lorsque la météo le permettait. Puis à partir du 10 jusqu'au 23, je suis resté à la maison du fait de la baisse de mes globules blancs et de mon faible niveau d'hémoglobine. Fatigué et souvent essoufflé, je me suis reposé au coin du feu.
Le 11 février, je reçois un appel affolé de la surveillante de l'hôpital de jour. Il faut que j'arrête l'EPO. Visiblement l'information n'est pas arrivée jusqu'à l'hôpital de jour. En fait, 3 semaines auparavant, j'avais déjà pris les devants en voyant mon hémoglobine qui culminait proche de la limite haute définie par le laboratoire d'analyse à 17.5 g/100ml. J'avais appelé le 18 janvier le Dr Raffoux qui connaît bien mon dossier : résultat, il est souhaitable d'arrêter, donc j'ai arrêté. Le fabricant du produit conseille même d'arrêter vers 14 g/100ml pour éviter les complications et de reprendre vers 12 g/100ml. J'ai donc arrêté le 21 janvier pour ne reprendre que le 18 février.
Il n'y a pas de grosse découverte par rapport aux derniers traitements à L'Aracytine. En bleu, vous trouverez les réponses actuelles, en noir, les réponses du 17 décembre et en pointillés les réponses du 7 juin.
Ci-dessous la courbe des lymphocytes, le niveau moyen est à 400/mm3 environ ce qui est nettement inférieur à la limite basse admissible fixée à 1500 : normal ce sont eux qu'on soigne et qu'on maintient volontairement bas.
Ci-dessus la courbe des polynucléaires neutrophiles. Cette courbe s'affine de traitement en traitement et montre ma période de vulnérabilité aux infections (ici lorsque leur nombre est inférieur à 1000/mm3). Les 2 derniers traitements ont une réponse assez semblable. La période de vulnérabilité se dessine peu à peu entre le 13ème jour et le 23ème jour (si on ne tient pas compte de la courbe en pointillés).
Ci-dessous la courbe d'hémoglobine, mes hypothèses de décembre sur les conditions initiales se vérifient : il faut avoir un niveau important d'hémoglobine au début du traitement pour éviter les transfusions et les effets secondaires liés à un niveau très faible en hémoglobine. La courbe en bleu ne passe pas en dessous de la barre des 8 g/100ml, il n'y a donc pas eu de transfusion cette fois-ci grâce à l'utilisation de L'EPO. On notera que le niveau initial est trop important, le fabriquant préconise un niveau maximum de 14 g/100m mais dans ce cas il y a un risque de repasser en dessous des 8. Il faudra probablement s'arranger pour prendre le produit en continue avec une concentration plus faible 5000 UI au lieu de 10000 UI. A suivre pour les prochains traitements.
Ci-dessous, la réponse des plaquettes. On notera que l'EPO à une légère influence sur l'évolution des plaquettes. Les traitements 1 et 2 étant sous l'EPO.
Date | J Cure (0) | Inter cure : Oui / Non | Dose ou Commentaire |
30-Jan-02 | -2 | Non | - |
06-Fév-02 |
5 |
Non | - |
13-Fév-02 | 12 | Oui | 1/2 dose (bilirubine T > 20 mg/l) |
20-Fév-02 | 19 | Non | Polynucléaire Neutrophiles < 700 et < 1200 /mm3 |
27-Fév-02 | 26 | Oui | 1/2 dose (bilirubine T > 20 mg/l) |
06-Mar-02 | 33 | Non | Prochaine chimio dans 1 semaine |
Pleine dose : Purinéthol = 2 comprimés / j, Méthotrexate = 8 comprimés / semaine
0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 | 24 | 25 | 26 | 27 | 28 | 29 | 30 | 31 | 32 | 33 | 34 | 35 | 36 | 37 | 38 | 39 | 40 |
Résultats de l'ostéodensitométrie
Les résultats montrent que les corticoïdes ont eu effet dévastateur sur l'état de mon squelette. La minéralisation vertébrale est inférieure de 22 % aux valeurs normales pour une personne de mon âge (Densité Minérale Osseuse pour l'ensemble des vertèbres lombaires L1 à L4 : DMO (L1-L4) = 0.839 g/cm2). Ce résultat peut paraître normal pour une personne de plus de 80 ans. La minéralisation fémorale est inférieure de 21% (DMO = 0.703 g/cm2 au niveau du col du fémur). Ce résultat peut paraître normal pour une personne de plus de 70 ans. Du coup, je me sens vieux, vraiment très vieux... Vivement ma consultation en rhumatologie le 8 avril à l'hôpital Cochin. Merci à Arnaud F. pour le contact. A suivre...
Anticiper le prochain traitement
J'ai écrit ce qui suit sous forme d'un exercice, histoire de "jouer" avec les données que j'ai à ma disposition. J'ai toujours trouvé amusant de tirer des plans sur la comète. Et puis, que ne ferai-je pas pour améliorer mon confort... Cet exercice a été écrit avant cette chronique. Il est donc facile d'en vérifier les quelques résultats avec ce qui est détaillé plus haut. Il me manque toutefois la dernière valeur d'hémoglobine puisque je ne l'aurai que ce soir. Mais en analysant la tendance, vous verrez que finalement je ne suis pas loin de la réalité.
Le traitement au Méthotéxate et à l'Asparaginase s'étant bien déroulés en décembre dernier, je souhaite renouveler cette expérience pour le 14 mars. Effet placebo ou non, avec l'EPO, c'est la première fois que ce traitement se passe si bien. Pourquoi ? vraisemblablement parce que j'avais un bon niveau d'hémoglobine et un excellent moral (pas d'angoisses particulières). En fait le traitement du 14 mars sera mon 5ème traitement de ce type. Je commence à bien connaître ses effets. Ci-joint les dates correspondantes au début de chaque traitement. Je n'ai pas fait apparaître le traitement du début mai pour lequel je n'ai pas d'information. Le nombre qui suit la date est la quantité d'hémoglobine à cette période. Vous constatez que le 17 décembre le niveau est plus fort.
Exercice 1 : sachant qu'aujourd'hui nous sommes le mercredi 13 février j'ai un niveau d'hémoglobine de 12.3 g/100ml. Quand dois-je reprendre le traitement d'EPO pour que le 13 mars j'ai 14.9 ?
Réponse : analyse avec les données existantes du 5 décembre 2001 (J Total = 281) au 23 janvier 2002 (J Total = 330). J'ai éliminé volontairement le point correspondant au 28 novembre qui perturbe sérieusement l'étude. La régression linéaire ci-jointe montre l'évolution de l'hémoglobine durant cette période. Les points sont les données réelles. La droite est le résultat de l'interprétation.
Exercice 2 : le fabricant d'EPO autorise un accroissement mensuel maximum de 2 g/100ml/mois et un niveau d'hémoglobine maximum de 14 g/100ml. Si je commence maintenant avec ces nouvelles spécifications. Quel niveau d'hémoglobine aurai-je le 13 mars ? Attention la fréquence des injections doit être maintenue à 3 fois par semaine, seule la concentration du produit peut être modifiée. Elle est actuellement de 10000 UI et on a décidé arbitrairement de la passer à 5000 UI.
Note : cette question met en évidence le problème délicat du suivi des patients de l'hôpital de jour : le patient peut dépasser ces spécifications sans qu'on l'avertisse ou du moins à temps. J'ai de la chance, je m'intéresse au sujet et j'ai appelé lorsque j'ai vu le problème. Il y aurait un joli projet d'automatisation de ce suivi !
Donc :
Note : Si on veut 14 g/100ml absolument pour le 13 mars, il suffit de faire le raisonnement inverse pour trouver exactement la concentration et on trouve 5495 UI. La combinaison des concentrations ne nous permet que 5000 ou 6000 UI. 5000 s'avère être le bon choix (mais la combinaison fait qu'il faut maintenant 2 piqûres à chaque séance). A essayer en vrai pour valider l'hypothèse de la pente (*).
(*) depuis, à en regarder la courbe d'hémoglobine obtenue en début de chronique, l'hypothèse de la pente est vérifiée même si la valeur du 13 mars est manquante. De plus, pour des raisons bassement logistique je n'ai pu commencer l'EPO que le 18 Février. Alors c'est plus que vérifié.
La sécurité sociale : je crois que c'est enfin sur les rails...
Après bien des péripéties sur le dossier "maladie professionnelle", la sécurité sociale a refait les comptes des indemnités journalières en maladie professionnelle. C'est rétroactif depuis le début de ma maladie. Depuis le 22 octobre où elle avait donné son accord, l'ensemble du processus de paiement semble enfin sur les rails. J'ai donc reçu un virement confortable le 14 février, fête des amoureux, aie... aie... c'est bien tentant ! Mais encore un peu de patience ma dévoreuse de porte-monnaie, il reste un problème de taille, la mutuelle aurait-elle trop payé jusqu'ici ? A suivre...
Sur les rails c'est bien le mot. La lourde machine est lancée maintenant. Près de 3 mois de réaction... attention au grain de sable, je pense particulièrement au travail à temps partiel qui mettra une belle pagaille. Je pense au renouvellement de mes arrêts de travail qu'il faudra établir sur un formulaire spécifique quasi-introuvable. Le dernier m'a été refusé, il était écrit sur un formulaire classique.
Turlulu,Turlulu, Turlulu, Tah! Tah! Tah! ... Ici Londres !...
Les sorties ont été nombreuses, comme si je voulais rattraper le temps perdu. Beaucoup de rencontres, d'apéritifs, de repas... Me voilà qui grossit, qui grossit... Je bats tous mes records ! D'ailleurs Françoise rentre de la bibliothèque avec une surprise (une mauvaise), c'est un livre pour moi intitulé : "comment perdre son ventre en 3 semaines"...
- Carole et Eric, merci pour votre invitation. La présence des Brésiliens a rajouté un soupçon amusant d'imprévus. Quant à Etienne depuis le temps que j'en entendais parler, je suis vraiment content de faire sa connaissance et d'avoir partagé notre expérience sur la culture d'entreprise indienne et celle des pays de l'Est.
- Stéphane : j'ai toujours une pensée pour toi. Prends bien soin de toi. Vivement ta sortie de l'hôpital. A bientôt.
- Sylvie : continue à te rétablir et accroche-toi, je pense beaucoup à toi.
- Anne, Hubert et les enfants : merci pour votre invitation ce pâté de sanglier et la biche fut succulente malgré notre retard. Merci aussi pour les entrées à Walt Disney Studio. Il a fait froid, il pleuvait... c'est un lieu public qui normalement m'est déconseillé : pied de nez à ma maladie. C'était bien !
- Jacqueline et René : merci pour la choucroute et le Saint-Emilion.
- Sandrine et Christophe (nos nouveaux voisins) : merci pour l'apéritif.
- Thérère et Doug : merci pour le sauté de veau et l'agréable promenade en forêt..
- Réjane et Thierry : merci pour les daurades. Votre maison est très belle !
- Caroline : compte tenu du résultat de l'enquête sanitaire, je maintiens : le métro n'est pas encore fait pour moi.
- Carole F. : Je suis une vraie "chochotte" en ce moment. Je crois qu'il vaut mieux remettre à plus tard l'activité kayak car même si je suis un pro en la matière et prêt à secourir toutes les demoiselles en détresses, je ne suis pas à l'abri de prendre le bouillon (pas glop pour l'asepsie mon cathéter). Quant à l'escalade... Bon je garde espoir pour une ballade prochainement (fin mai ou juin) !
- Marion : merci pour ton long mail. Je crois qu'il y a matière à réfléchir et à agir ! En attendant les minous t'embrassent très fort !
- Pierre B. : bon bricolage, la plomberie est vraiment une activité agréable. Bon courage ! A bientôt.
- Laurent M. : J'espère que tu as poussé tes promenades après Rouen par Duclair jusqu'au pont de Brotonne, puis Caudebec en Caux. C'est un coin vraiment très charmant que j'ai eu l'occasion de visiter au cours de mes nombreux déplacements professionnels en Normandie. Je me souviens aussi du passage sur la Seine des "Voiles de la liberté" pour fêter le bicentenaire de la révolution (il y avait Tabarly sur son Penduick 1 et une grande quantité de navires "école"). Si au cours de tes nombreuses promenades normandes tu cherches une chambre d'hôte, je te conseille celle de Saint Arnoult en Caux, près de Caudebec, chez Chantal et Lulu. Ils sont vraiment très sympas.
Prochaine chimiothérapie, le 14 mars et le 15 mars. Je vous souhaite un bon courage à tous.
A bientôt.
Les surprises sont toujours peu agréables avec le traitement de chimiothérapie basé sur le Méthotréxate. Je pensais que ce traitement était complètement sous contrôle, eh bien non ! J'ai oublié un facteur dans mes analyses précédentes : la bilirubine. Cette fois il semble qu'elle m'ait joué des tours et prolongé mon temps de récupération. Mais qu'est-ce que la bilirubine ? Et puis, quel est son lien avec la gastronomie, la peinture ou même Cambronne ? Non, non ! Je vais bien mentalement je vous assure... En tout cas j'étais arrivé avec taux de bilirubine bien fort à la chimio du 14 mars contrairement à Noël dernier où tout c'était bien passé. Dois-je payer les premiers effets pervers de l'EPO ? Comme un problème n'arrive jamais seul, ma fatigue prolongée fait le lit des maladies opportunistes. Un herpès labial sera vite jugulé heureusement mais un mauvais rhume persistera plus d'un mois malgré les antibiotiques.
A l'accoutumée, les effets du traitement restent toujours sur 3 semaines. Je suis fatigué et je dois éviter les contaminations potentielles. Aussi lorsque cette période se termine, je profite du temps avant la prochaine chimio. 3 semaines où je croque la vie à pleines dents. Certes j'ai quelques coups de fatigue, mais rien de bien méchant. Voici le temps des anniversaires : celui de Théo, mon père, et moi qui affiche une nouvelle dizaine. Nous l'avons fêté ensemble comme l'an passé. Les rencontres et les rendez-vous s'enchaînent. Fiifo célèbre ses 10 ans. C'est aussi la première consultation à l'hôpital Cochin pour la perte de ma masse osseuse, puis mes premières vacances à l'île d'Oléron...
Il est temps maintenant de retourner à Saint-Louis pour le prochain traitement, mais là, je vous en parlerai la prochaine fois.
Détail de la séance
J'ai rejoint le jeudi 14 mars l'hôpital Saint-Louis pour une chimiothérapie de 2 jours basée sur du Méthotréxate et de l'Asparaginase. Comme c'est la cinquième fois que je reçois ce produit, je n'ai pas grand chose à rajouter. J'ai fait une bonne marche à pied à mon retour de cette première journée. C'est la première fois que cela m'arrive car habituellement je suis déjà fatigué. Enfin, ce n'est que temporaire car à mon retour de l'hôpital le vendredi, cette fois j'étais vraiment très fatigué. Les ordonnances, le tableau de bord du traitement précédent et le formulaire d'arrêt de travail pré-rempli ont fait une excellente impression. Après une relecture commune, l'interne s'est empressé de signer et d'ajouter le tampon de l'hôpital. Nous avons convenu de réduire la dose d'EPO (5000 UI une fois par semaine au lieu de 3 fois par semaine) car le traitement au Méthotrexate reste légèrement plus "doux" que pour l'Aracytine. La surveillante de l'hôpital de jour a vraiment apprécié le formulaire d'arrêt de travail car elle ne les avait pas encore reçus de la sécurité sociale. Voilà, du côté administratif je peux affirmer que c'est réglé jusqu'au prochain traitement.
Retour à la maison
De retour à la maison je pensais que ma réponse vis à vis de ce traitement allait se dérouler comme pour Nöel dernier avec seulement 4 jours de repos accompagnés de nausées contenues par du Zophren et du Primpéran. Mon niveau d'hémoglobine étant supérieur à ce j'avais prédit (15.3 g / 100ml au lieu de 13.6 estimé : l'erreur vient du fait que je n'ai pas eu d'inter cure la dernière semaine laissant à l'hémoglobine la faculté d'évoluer plus que l'estimation), tout devait se répéter comme en décembre. En fait, ma remise sur pied a pris plus de temps car j'ai oublié dans mon analyse un facteur important : le taux de bilirubine. Mais nous verrons ce point plus loin. En résumé :
La durée de l'antibiotique sera portée à 10 jours car le rhume persiste toujours mais il n'y a pas eu de surinfection. J'ai bon espoir les globules blancs remonteront en nombre au vingtième jour après la chimio.
La bilirubine
J'ai commencé avec cette chimio avec un taux élevé de bilirubine. Voyons cela dans le détail même si cela peut paraître un peu technique, il me paraît toujours captivant de creuser le sujet. Je vous ai longuement parlé d'EPO, d'hémoglobine et il serait vraiment dommage de ne pas aborder la bilirubine. En plus dans la bilirubine il y a le mot bile et ce n'est pas vraiment pas un hasard.
(*) et (**) : Théorie de la constante brune : J'ouvre ici une parenthèse à ce sujet au combien sérieux. Cette coloration ne vous a-t-elle jamais intriguée ? Moi, si ! Depuis longtemps et pour plusieurs raisons :
Mais revenons à cette bilirubine...
La figure ci-dessous à gauche montre l'évolution de l'hémoglobine entre le 100ème et le 400ème jour depuis le début de mon traitement. Il est facile de voir qu'il y a eu une évolution très nette de l'hémoglobine un peu avant 300ème jour. Pour être plus précis, cette évolution date du 28 novembre (j = 274) date à laquelle j'ai commencé la prise de l'EPO.Par ailleurs la figure ci-dessous à droite montre l'interaction entre la bilirubine libre et conjuguée. Le fait que la population de points s'organise le long de la diagonale montre une certaine interaction. L'absence d'interaction se matérialiserait par une répartition aléatoire des points sur l'ensemble de la surface. Cette remarque va me permettre d'utiliser pour la suite de l'analyse la bilirubine totale car je n'ai pas encore assez de données en bilirubine libre.
Dans le paragraphe "retour à la maison" je vous avais parlé d'un fort taux de bilirubine avant mon traitement au Méthotréxate, ce qui, contrairement au même traitement effectué à Noël, m'avait rendu bien malade. La figure suivante montre l'évolution de la bilirubine totale au cours d'un cycle composé d'un traitement à l'Aracytine (de j Cycle = -40 à 0) et d'un traitement au Méthotréxate (de j Cycle = 0 à 40). Le cycle 1 en rouge a commencé le 7 novembre et le cycle 2 en bleu a commencé le 30 janvier 2002. A j Cycle = 0, on remarque un taux fort de bilirubine totale pour la courbe bleue (c'était la chimio du 14 et 15 mars qui s'est caractérisé par de fortes nausées et vomissements jusqu'à j Cycle = 10) et un taux beaucoup plus faible pour la courbe rouge (j Cycle = 0 <<rouge>>, c'était Noël et ça s'était bien passé). La chimio thérapie en j Cycle = 0 combinée à un fort taux de bilirubine provoque d'importantes nausées et des vomissements (courbe bleue). Par contre j'ai pu vérifier cliniquement qu'un taux élevé de bilirubine sans chimio (ou j Cycle >= 10) ne provoque ni nausées ni vomissements.
Ce que l'on sait (voir revues spécialisées) c'est que les globules rouges ont une durée de vie moyenne de 120 jours. On peut raisonnablement penser que l'évolution de la bilirubine sur la courbe bleue (entre j Cycle = -15 et j Cycle =10) trouve son origine dans la production massive de globules rouges 120 jours auparavant. C'est à dire à j Cycle = -15 jusqu'à j Cycle = 40 sur la courbe rouge ci-dessous. De la même façon, le faible niveau de bilirubine à j Cycle = 0 sur la courbe rouge ci-dessus trouve également sa source dans la courbe noire ci-dessous vers j Cycle = - 40.
Le niveau d'hémoglobine plus important grâce à l'EPO engendre un niveau de bilirubine plus élevé. Ce qui n'est pas sans perturber la dose des inter cures hebdomadaires. On constate ainsi que 33% des inter cures hebdomadaires durant le traitement au Méthotrexate en décembre dernier ont été à 1/2 dose alors que depuis le 15 mars, 100% des inter cures sont à 1/2 dose. La qualité de vie l'emporte sur la qualité du traitement qui devrait être à pleine dose. Il devient nécessaire de réfléchir sur le moyen de retrouver la qualité d'un traitement optimum tout en conservant dans la mesure du possible une certaine qualité de vie.
Date | J Cure (0) | Inter cure : Oui / Non | Dose ou Commentaire |
13-Mar | -1 | Non | |
20-Mar | 7 | Non | |
27-Mar | 14 | Oui | 1/2 dose (bilirubine T > 20 mg/l) |
03-Avr | 21 | Oui | 1/2 dose (bilirubine T > 20 mg/l) |
10-Avr | 28 | Oui | 1/2 dose (bilirubine T > 20 mg/l) |
17-Avr | 35 | Non | Prochaine chimio dans 1 semaine |
Pleine dose : Purinéthol = 2 comprimés / j, Méthotrexate = 8 comprimés / semaine
Conclusions : il est nécessaire d'éviter un fort taux de d'hémoglobine qui peut engendrer à terme un niveau important de bilirubine avant de commencer un traitement au Méthotrexate. De la sorte, diminuer l'hémoglobine m'affranchirait ainsi de nausées importantes et de vomissements. La qualité de vie s'en trouverait alors améliorée. Mais ce serait sans compter sur le confort de vie général qui dépend directement du niveau d'hémoglobine. Il est donc nécessaire d'échafauder un habile compromis entre le taux d'hémoglobine, le taux de bilirubine, qui apparaît souvent bien après, et, éventuellement la qualité de traitement des inter cures par les 1/2 doses qui deviennent de plus en plus systématiques. Il semble cependant que cette diminution de dose des inter cures ne provoque aucune surproduction des lymphocytes. La courbe bleue évoluant dans le même intervalle que les traitements précédents au Méthotréxate.
Donc, un exemple à expérimenter serait d'essayer de lisser l'hémoglobine tout au long des traitements pour éviter les à-coups en bilirubine. Pour cela je continue à affiner le dosage : je sais maintenant que ce dernier se situe entre 5000 UI et 30000 UI par semaine. 5000 UI reste insuffisant pour affronter le traitement à l'Aracytine sans transfusion et 30000 UI culmine au-delà des limites admissibles ce qui m'oblige à arrêter l'EPO de temps en temps.
Le temps des anniversaires
Avec le printemps, la période des anniversaires refleurit. Nous avons fêté cela en petit comité le 31 mars. En fait, je n'étais pas en forme le 22, alors rien ne sert de forcer les choses, le 31 est donc mieux indiqué. Mes parents et beaux-parents ainsi que ma grand-tante Georgette étaient présents. 6 ans pour Théo, 40 pour moi (eh, oui ! me voilà Quadra) et 64 ans pour Pépé. Au menu, saumon frais accompagné de brocolis, Chablis 88, puis bien entendu un beau gâteau d'anniversaire (avec des fraises en plus : merci belle-maman !). Le soleil a répondu à l'invitation.
Cette année, j'ai troqué ma casquette de Mickey contre le chapeau d'Indiana Jones plus adapté à la protection solaire (mon capital soleil étant sérieusement consommé avec la radiothérapie du crâne et la chimio).
Le lendemain, grâce à Ginette (notre voisine dont le mari est un fin chasseur), nous avons mangé du chevreuil et nous nous sommes tous régalés. Merci à Ginette et merci à tous d'avoir pensé à mon anniversaire : bouteilles de vin (avec le temps beaucoup apprennent mes points faibles), Agatha Christie, Architect 3D (pour mes futurs projets de travaux à la maison : projets ? c'est, un bon présage), dictionnaire médical (pour approfondir mes recherches)...
... et j'en oublie bien évidemment, sauf un qui me revient en mémoire par sa singularité : le cadeau d'Anne. Accompagné d'un petit mot :" douce pour les câlins, fine, souple, on peut la prendre facilement, la pétrir, la mordiller sans danger. Et pour s'amuser, il suffit de presser son ventre pour l'entendre rire". Que peut bien être le contenu de ce cadeau ? Une belle demoiselle pour mon anniversaire ? Non ce ne serait pas raisonnable ! Et puis l'emballage est trop petit. Je secoue le cadeau, oui ! Il y a bien quelque chose à l'intérieur. Je crains le pire. Anne n'aurait pas fait ça ! Pas une poupée gonflable quand même ! Je commence à ouvrir, je vois écrit sur l'emballage Sophie. J'ai très peur. Je continue à déchirer le papier. Ca se précise mais je ne sais toujours pas ce que c'est : "chaque moment est un éveil, chaque jour est une fête". Je donne ma langue au chat, enfin si je peux m'exprimer ainsi. Puis, je vois "Girafe Sophie", mais qu'est-ce que c'est que ce truc ? Je m'acharne sur l'emballage de cette Grande Sophie qui ne veut pas se laisser déshabiller ! Je m'agace, je déchire tout ! Et je découvre : "c'est l'amie de bébé depuis près de 40 ans". J'y suis ! Pour connaître la suite cliquer <ici> !
Fiifo fête ses 10 ans
Le 4 avril : Fiifo (Formation des ingénieurs en informatique de la Faculté d'Orsay) fête ses 10 ans. 400 ingénieurs informaticiens sont maintenant dans la nature. J'ai aimé les différents exposés qui d'année en année deviennent de moins en moins académiques et laissent place à des sujets avec résultats très concrets. Les travaux de la spécialisation Multimédia ont été vraiment impressionnants et offrent de belles perspectives pour le monde de la communication et du cinéma. Les travaux en Génie Logiciel continuent à progresser avec l'arrivée de la dernière norme ISO 9001 version 2000. Il est question de preuve (je vous rassure il n'est pas question de "preuve logicielle" qui a un sens très stricte et qui reste très complexe et spécifique. Ici, prouver c'est apporter l'évidence que toutes les étapes de conception et de maintenance du logiciel ont été respectées). Frédéric professeur à Fiifo mais aussi auditeur expert à l'Otan a su montrer avec brio les progrès dans ce domaine et mettre en lumière l'ambiance quotidienne et très particulière de ce métier. Oui ! Comme il est agréable de constater qu'un confrère arrive aux mêmes conclusions ! Coup de chapeau à Mme Heidemann (que je ne connaissais pas de visu) et à toute son équipe. C'était un grand plaisir de vous revoir tous.
Ostéopénie, la première consultation
Le 8 avril était mon premier rendez-vous en consultation avec le docteur Catherine Cormier du service de rhumatologie à l'hôpital Cochin. L'objectif est de comprendre puis éventuellement traiter cette ostéopénie (perte de la masse osseuse par décalcification) de 20% provoquée par les corticoïdes en début de traitement il y a un an. En fait il apparaît qu'assez peu de personnes en traitement pour une leucémie viennent la consulter soit parce chacun réagit de façon différente aux corticoïdes soit probablement parce qu'ils ne connaissent pas leur ostéopénie : ils n'ont pas eu la "chance" de faire une chute en courant avec leurs enfants. Il existe des traitements, mais avant tout, il s'agit de bien comprendre le métabolisme osseux. Comme je suis un sujet "jeune" (il est toujours agréable d'entendre cela), il est possible que le processus de régénération osseux se fasse sans traitement particulier. Quoiqu'il en soit la régénération est un processus long, je dois m'armer de beaucoup de patience.
Ayant préparé cet entretien, j'avais préparé une courbe sur les phosphatases alcalines. Ce paramètre, résultat de mes analyses sanguines, m'intriguait depuis plusieurs mois car il s'accentuait de plus en plus et bien au dessus des normes habituelles (max. 90 UI / l).
![]() |
|
J'avais lu qu'un excès pouvait mettre en évidence une carence en vitamine D (elle sert à fixer le calcium dans nos os ; en présence d'un manque de calcium l'organisme puise dans ces derniers, c'est la décalcification). Je lui ai demandé ce qu'elle en pensait et m'a confirmé ce point en ajoutant que l'accroissement était dû à un phénomène saisonnier. En effet nous ne synthétisons la vitamine D qu'en présence du soleil et l'hiver nous en fabriquons moins. De plus, les radiations ionisantes que j'ai reçues du fait de mon activité professionnelle et le traitement de la leucémie par radiothérapie, ne me permettront pas de m'exposer dans les années futures. Donc une ampoule de vitamine D m'est prescrite tous les 3 mois pour compenser ce déficit en soleil.
Plan d'attaque : le 10 avril, comprendre le métabolisme osseux actuel par une prise de sang, puis prise de la vitamine D. Le 18 juin nouvel examen pour examiner l'influence de l'apport vitaminique. Prochain rendez-vous le 26 septembre. Un examen ostéodensitométrique est prévu en décembre 2000. A suivre donc...
Note : pour ceux intéressés par l'ostéoporose, il existe un site vraiment bien fait qui explique les causes, les aliments à préférer, ceux à éviter. Il propose même "une calculette à calcium" qui permet d'évaluer vos carences en fonction de vos habitudes alimentaires.
Les sorties
Premières vacances depuis longtemps : l'ile d'Oléron
La mauvaise expérience du mois d'août dernier en Bourgogne m'avait fait bien réfléchir. Allais-je pouvoir partir de nouveau ? Oui, car tous mes travaux d'analyse de cet hiver me permettent d'établir aujourd'hui des prédictions. Certes, comme vous avez pu le constater, il reste une zone d'ombre avec le Méthotrexate, mais cette période reste localisée autour de la première semaine après le traitement en hôpital de jour. Pour simplifier la logistique, j'ai choisi de partir le mercredi 17 avril aussitôt après le prélèvement sanguin et le renouvellement du pansement de mon cathéter. Comme tous ces soins sont les mercredis, nous rentrerons le mardi soir suivant. Pour l'EPO, je me ferai les piqûres moi-même. Me voilà donc libre pour une petite semaine. En route pour l'île d'Oléron chez mes parents.
Au fait ! il faut voter cette semaine là ! C'est le premier tour des élections présidentielles. Quelle idée de mettre des élections en plein milieu des vacances scolaires ! Pas de problème, nous ferons comme l'année passée pour les élections municipales, nous voterons par procuration. Pas de problème ? Si, même plein de problèmes... Car je ne suis plus hospitalisé. Après un déplacement à la mairie de Bullion, 3 déplacements à la gendarmerie de Saint-Arnoult, 2 déplacements à la mairie de Dolus d'Oléron et à la gendarmerie de Saint-Pierre d'Oléron effectués par ma mère, nous pouvons enfin voter par procuration. Il fallait vraiment avoir envie de voter ! Ne sommes-nous pas au XXIème siècle, dans l'ère de l'e-business, du zéro papier ? Il possible de déclarer ses impôts sur Internet, alors ! Et le reste ? Que fait notre chère administration ? Et je ne parle pas de la justice qui croule sur des montagnes de dossiers, qui au demeurant ne sont pas lus faute de temps, se perdent ou brûlent...
Mon frère et Isabelle, mes neveux sont présents. Je ne l'ai avais pas vu depuis ma maladie. Quel plaisir de les revoir ! Si Sylvain, l'aîné (12 ans), a grandi, son frère Antonin (9 ans) a grandi encore plus au point de rattraper son frère. 10 cm les séparent. De plus il a beaucoup changé et paraît plus calme et plus doux. Fanny et Théo étaient enchantés de les retrouver. Au planning : plage, promenade à pieds ou à vélo, cheval... quelques jours de pur bonheur !
Turlulu,Turlulu, Turlulu, Tah! Tah! Tah! ... Ici Londres !...
Prochaine chimiothérapie le jeudi 25 avril. Elle marque la dernière étape dans le protocole car maintenant les chimiothérapies pratiquées à l'hôpital s'espacent de 60 jours (au lieu des 42 jours aujourd'hui) et ce jusqu'à la fin du traitement.