26 février 2003 : Deux ans d'une nouvelle vie

Cette chronique marque un événement tout particulier. Il y a exactement 2 ans, ma vie a basculé et aurait dû s'arrêter. Mais depuis 50 ans, des progrès spectaculaires ont été réalisés et j'ai la chance d'en profiter. Deux ans et je suis encore là. Deux ans de sursit, deux années difficiles, mais deux ans d'une nouvelle vie. Quelle joie de vivre ! Ce bonus supplémentaire je le dois à tous ceux qui se sont acharnés durant ces années et qui continuent à en faire leur combat quotidien. Bien sûr, il existe encore bien des cas tragiques. Le personnel de santé n'a d'autres solutions que de prendre sur lui, d'en ressentir de terribles frustrations lorsque le résultat escompté n'est pas au rendez-vous. Pourtant je m'interroge sur ce qui peut l'animer, le motiver dans cette lutte quotidienne qui semble parfois perdue d'avance ? Vocation ? Goût du challenge ? Passion ?

Cher Personnel de Santé,

Sachez que je vous admire et je vous dois tout ! Dans mon malheur, je crois avoir eu beaucoup de chances et c'est grâce à vous si je réponds encore présent aujourd'hui. Goutte après goutte, les traitements se sont enchaînés puis se sont espacés. Nous nous voyons moins souvent, pour certains nous ne nous voyons plus mais sachez que je suis toujours là, bien vivant. Je pense souvent à vous. Encore 250 jours de traitement et, dans le meilleur des cas, un suivi étroit pendant plusieurs années. Je profite donc de cette chronique pour vous témoigner toute ma gratitude, vous remercier de ces 2 ans de bonus que vous venez de m'accorder.

Merci donc, au service des Urgences de l'hôpital de Rambouillet pour avoir soupçonné cette maladie et m'avoir aiguillé aussitôt sur l'hôpital Saint-Louis. Merci au service d'hématologie de l'hôpital Saint-Louis de m'avoir accueilli. Merci à vous : Pr Laurent Degos, Pr Hervé Dombret, Dr Emmanuel Raffoux, Dr Adrienne Delaballe, Dr Delphine Réa, Dr Philippe Rousselot, Pr Claude Maylin, Pr Christian Gisselbrecht. Merci aussi à vous, Nicole Barbier et Maryse Génin ainsi qu'à toutes les infirmières (il y a des infirmiers aussi), aides soignantes (aides soignants aussi) et tous ceux que je ne peux nommer faute de n'avoir pas pris assez de notes pendant mes séjours. Aussi, transmettez-leur ce message de gratitude et j'espère qu'elles (ils) me pardonneront d'avoir oublié leur nom. En revanche je n'oublie en aucun cas leurs actions. Merci à vous tous, vous qui m'avez accompagné, avec votre abnégation, avec votre chaleur, de jour comme de nuit, dans ces moments souvent difficiles. Merci de tout coeur.

Vous trouverez ci-joint quelques photos inédites que j'avais prise avec ma petite Webcam lors de mon isolement en chambre stérile en février 2001.

Pr L. Degos, ? et Adrienneinédit2Françoise et moiinédit4inedit5Radiothérapie

Merci aussi à Mathilde Pasquier, Marie Kremer et Bernard Monier qui ont assuré jusqu'ici le relais infirmier à la maison (prises de sang hebdomadaires et soins de mon cathéter à émergence pendant 18 mois, un record semble-t-il d'après les chirurgiens). Merci à Michel Mistral mon taxi, qui m'emmène à chaque fois pour une nouvelle séance de chimiothérapie, qui m'attend la plupart du temps ou bien me trouve toujours une solution pour me ramener à la maison.

Merci aussi à tout mon e-fanclub qui durant toute cette période a répondu à mon appel au secours du 14 février 2001 et a su entretenir ma flamme par son soutient, ses encouragements affectueux et réguliers. D'ailleurs, il continue aujourd'hui sous diverses formes, bien sûr, toujours par le biais d'Internet, mais aussi de visu sur la croisée de nos chemins menant à l'école des enfants, ou en course, ou au travail lors de mes trop brèves incursions ou encore au cours de mes différentes sorties.

Pour terminer cet hommage, un grand merci à Françoise ma chère et tendre qui assume tout depuis 2 ans, le quotidien, les enfants, les tâches administratives... tout ! Même, mes sautes d'humeur plus fréquentes dignes d'un malade qui se porte mieux, mes caprices et dernièrement mes absences fréquentes dans mes pensées, dans mes lectures ou dans l'écriture. A défaut de "globe trotter", je suis présent à la maison sans l'être. Les détails matériels de la vie quotidienne m'échappent, la maison peut s'écrouler sans que je m'en aperçoive. Françoise a vraiment du mérite :

Je rêve les yeux ouverts ça fait du bien
Ca n'va pas plus loin
J'veux pas voir derrière puisque j'en viens
Vivement demain ! Oh oui, demain !

Extrait de la chanson: "Je rêve les yeux ouverts": ENZO ENZO

Merci, merci, merci... mille fois !

Retour dans le monde bouillonnant

Je suis revenu travailler le mardi 28 janvier, mais avec une incertitude : un mauvais rhume. Allais-je vraiment revenir au bureau ? Finalement oui. Mais une course au garage Renault du coin m'a retardé et je suis arrivé plus tard que prévu. Au travail bon nombre d'entre vous se sont inquiétés : "As-tu vu Régis ce matin ? Non ? N'avait-il pas écrit qu'il reviendrait ce matin ? Si pourtant j'ai vérifié sur son site Web... à moins que cela ne soit à cause de son rhume ?" Finalement je suis arrivé et ce fut un soulagement pour toute l'équipe.

Depuis mon retour en octobre, c'est ce mois de février qui a été le plus intense sur le plan professionnel. Tim, le patron de la division pour laquelle je travaille, a eu l'intention de faire briller le fruit de sa nouvelle organisation. Pour cela, rien de mieux qu'un nouveau portail regroupant toutes nos activités sur l'Intranet. Il a fallu faire vite car il avait déjà prévu une démo à son supérieur hiérarchique le 17 février prochain. J'ai mis de côté mon travail en cours (création d'un site pour la gestion des biens matériels) pour m'atteler à cette tâche avec Catherine, Caroline, Gilles, Francis et bien sûr Tim.

En fait, cette période a été beaucoup plus intense que je ne l'aurais imaginé. Il a fallu faire face à de brèves échéances et donc que je réapprenne à travailler en groupe, à gérer mon enthousiasme, mon énergie et mon temps. Travailler en groupe m'a demandé une période d'adaptation. Tout d'abord, durant ces 2 dernières années si j'ai combattu avec votre soutien, je suis resté seul, intransigeant et opiniâtre face à cette maladie : pas de négociation, personne à convaincre et aucune concession. Impossible de travailler en groupe avec une telle approche. Parallèlement, tel à un robinet qu'on aurait ouvert brutalement, le travail en groupe, les rebondissements successifs et l'émulation qui s'en est dégagée, m'ont rapidement submergé. Je m'étais laissé prendre au jeu par mon enthousiasme débordant. Je me suis retrouvé complètement épuisé dès la seconde semaine de travail. J'avais tenté de me donner à fond, pour faire comme avant. Mais c'était nier la réalité. Mon traitement demeurait bien réel : mes ressources, mon énergie restaient limitées avec des temps de récupération plus importants que mes collègues. Il a fallu donc que j'apprenne à mieux gérer mes actions, mon temps partiel et à mieux tourner la page lors de mes retours à la maison. Du moins, lorsqu'il s'agit de sujets captivants, de faire en sorte qu'ils ne soient pas trop envahissants.

Les sorties

ChristianLaurenceLaurence et FrançoiseChloé, Fanny et moi

Eric et moi : 1, 2 et ...Michel & VéroniqueMichelStéphanie : tu seras quand même sur la photo !

 

 

Turlulu,Turlulu, Turlulu, Tah! Tah! Tah! ... Ici Londres !...

Voilà, après ce mois de vie presque normal, je retourne jeudi 27 et vendredi 28 février à l'hôpital Saint-Louis pour une nouvelle chimiothérapie. Encore 250 jours et 4 séances de chimiothérapie en comptant celle-ci. Cela représente 75% du traitement en durée et près de 85% en nombre de séance de chimiothérapie. Retour au travail le 25 mars.

A très bientôt

Retour